Récap septembre 2016




Françoise Sagan - Je ne renie rien Entretiens 1955-1992 (Stock-2014)
Un vrai bonheur que de retrouver Sagan à travers cette « compil » d’entretiens où elle parle de la gloire (et de ses revers), de l’argent (et de ses revers), de l’amour (et de…).
C’est plein d’esprit, de finesse, de tendresse, de lucidité… J'adore !

« […] on ne m’ôtera jamais de l’idée que c’est uniquement en se colletant avec les extrêmes de soi-même, avec ses contradictions, ses goûts, ses dégoûts, ses fureurs, que l’on peut comprendre un tout petit peu, oh, je dis bien un tout petit peu, ce que c’est que la vie. » (p. 10)

« L’alcool a toujours été pour moi un bon complice. Et aussi un élément de partage, comme le pain et le sel. Cela dit, je n’ai jamais bu pour oublier la vie, mais pour l’accélérer. […] Donc, m’arrêter de boire m’a ennuyée, sans plus. De toute manière, je peux recommencer. » (p. 11)

« […] la seule règle morale est d’être, autant qu’on le peut, parfaitement bon et parfaitement ouvert ; on ne risque rien. » (p. 12)

« Il m’arrive de trouver que la vie est une horrible plaisanterie. Si l’on est tant soit peu sensible, on est écorché partout et tout le temps. » (p. 13)

« Ça a duré une seconde, ce qu’on appelle « le soleil de la gloire », après, ça n’a plus été que par des biais, mais une seconde, je me suis dit : « Tiens, c’est la gloire. » Et bizarrement, je n’avais pas beaucoup de plaisir ; j’ai su tout de suite que la gloire, c’était des questions et des réponses et une manière de biaiser avec la vérité. J’ai rencontré cela trop tôt. À dix-huit ans et en 188 pages… J’avais presque un sentiment de culpabilité tout en me sentant parfaitement irresponsable. C’était comme un coup de grisou de la gloire. » (p. 40)

« J’ai mis assez longtemps à comprendre qu’il me fallait un masque, le mettre sur ma figure. J’ai mis le masque de ma légende et elle a cessé de me déranger. J‘aimais bien aller vite, j’aimais bien faire la fête bien que ce soit un faux-semblant, une manière bigarrée de tromper la solitude, et puis j’aimais la gaieté, les rencontres. C’était un masque et aussi un petit peu moi ; dans ces conditions, c’était parfait. Il n’y avait plus trop d’efforts à faire. » (p. 42)

« On ne me classe pas dans la littérature mais dans les phénomènes commerciaux. Je tiens certainement une place dans l’édition, mais dans la littérature ? Je ne sais pas, je ne peux pas dire… » (p. 47)

« Je ne sais pas d’ailleurs si ce qu’on me reproche le plus, c’est d’avoir gagné beaucoup d’argent ou bien de l’avoir dépensé. J’ai l’impression que si j’avais acheté des chaînes de snack-bars, assuré ma vie pour mes vieux jours, les gens seraient moins scandalisés. […] Je suis attirée par tout ce qui n’est pas rassurant. Je ne cherche pas la sécurité, je ne sais même pas si je l’aime ou si je ne l’aime pas. Je n’aime pas posséder, ni économiser de l’argent. » (p. 48)

« On m’a retiré mon carnet de chèques parce que je passais mon temps à en distribuer à droite et à gauche. Et je finissais par avoir « des ennuis d’argent ». On m’a confié à quelqu’un qui paie tout pour moi : les poireaux, l’assurance des voitures, la maison. Quand je hurle, on m’envoie 1 000 F d’argent de poche. Et là s’arrêtent mes rapports avec le quotidien. » (p. 50)

« Le théâtre est un art absolument bourgeois, puisqu'une place vaut au minimum vingt francs. Et le rouge, le noir, l'or, les décors, la mise en scène, tout marche comme une petite fabrique de marionnettes. À part les maisons de la culture où l'on inflige à des malheureux, claqués, sortant de leur travail, du Brecht ou du Pirandello, ce que je trouve d'un snobisme effrayant. Sous prétexte qu'ils ne paient leurs places que cinq francs, après le travail, le métro, le train, on leur colle des pièces pour les faire penser, pour “éduquer” le peuple. Je me demande de quel droit on peut vouloir élever le peuple, comme s'il n'était pas assez élevé tout seul. Les intellectuels qui se disent de gauche n'ont généralement aucun respect de ce qu'on appelle le peuple. Du moment qu'il s'agit de gens fauchés et fatigués, ce public leur appartient. Qui est-on pour vouloir tirer les gens jusqu’à soi avec une poulie ? C’est d’une grossièreté ! » (pp. 78-79)

« J’ai trop le désir qu’on respecte ma liberté pour ne pas respecter celle des autres. » (p. 108)

« J’aime rêver, ne rien faire, voir le temps passer, sans jamais avoir la sensation d’être à vide, de s’ennuyer : la liberté, c’est ça. Je suis toujours incapable de me forcer à faire ce qui m’ennuie ; je prends la vie comme elle vient, je regarde à droite, à gauche, ni derrière ni devant. » (p. 114)

« Mon passe-temps favori, c’est laisser passer le temps, avoir du temps, prendre mon temps, perdre mon temps, vivre à contretemps. Je déteste tout ce qui réduit le temps, c’est pourquoi j’aime la nuit. » (p. 117)

« Je n’ai jamais eu de passion qui dure plus de sept ans […]. C’est toujours merveilleux quand ça commence. Au milieu, c’est encore mieux. Et à la fin… ça dépend de qui se fatigue le plus vite. De toute façon, c’est triste. Je n’ai jamais aimé quelqu’un sans l’aimer encore après. « Après », l’espèce d’adhésion de la tête avec le corps n’existe plus. Il n’y a plus que la tête qui marche… Mais il reste une chose, comme une cicatrice. Pas au sens triste du mot. Une cicatrice honorifique. La plus belle décoration… » (p. 129)

« Mon accident de voiture m’a appris qu’on est définitivement seul. Quand on a très mal, on est toujours seul. Les gens qui vous aiment le plus ne peuvent rien pour vous. » (p. 149)

« J’ai gagné de l’argent, j’en ai dépensé sans compter, ou en comptant trop tard. Je ne l’ai jamais gagné sur le dos d’autrui et je l’ai toujours dépensé avec d’autres. Je ne me sens coupable de rien. » (p. 156)

« Je me parle de temps en temps, bien sûr, quand j’ai le temps. J’ai des rapports assez amicaux avec moi-même. Je me supporte mais je ne me passionne pas. » (p. 182)

« [..] la lucidité n’implique pas une modestie outrée. Je considère que j’ai du talent. Plus de talent que beaucoup de gens ne le disent. Mais peut-être moins que certains ne l’affirment. Plus de talent que les neuf dixièmes des gens qui sont publiés actuellement. Mais je ne suis pas Sartre, je n’ai pas écrit Les Mots. » (p. 183)

« Pour avoir du génie, il faut sans doute ne faire que ça [écrire], ne se consacrer qu’à ça. Moi, j’ai passé ma vie à la vivre plus qu’à l’écrire. » (p. 183)

« […] je ne vois pas de recette pour s’aimer longtemps. Ni sa nécessité. J’ai trop le goût du bonheur pour avoir des désirs irréalisables. » (p. 227)

« […] il y a […] tous ces slogans stupides dans les journaux : « Soyez heureux »… « Comment être heureux »… Enfin, c’est abominable ! On leur explique comment il est honteux et stupide d’être malheureux parce que tout est fait pour être heureux. Alors, quand ils ne le sont pas, ils se sentent coupables.  […] Maintenant, si vous ne vous promenez pas en disant : « Tout va bien, tout va bien », on dit : « Pauvre crétin, va voir un psychiatre ou prends telle pilule ! » C’est quand même idiot. » (p. 229)

« Par rapport à la misère, au fait qu’il y a des gens fauchés, qui claquent du bec, qui sont malheureux, il y a deux positions. Il y a ceux qui disent : la misère existe, mais c’est inéluctable ; pour moi, ça fait des gens de droite. Et il y a ceux qui disent : la misère existe et c’est insupportable ; ça fait les gens de gauche. » (p. 230)

Autres extraits


Daniel Arsand - Je suis en vie et tu ne m'entends pas (Actes Sud-2016)
Après avoir passé quatre ans à Buchenwald pour homosexualité, Klaus Hirshkuh, la vingtaine, retourne dans sa ville à Leipzig. Les retrouvailles sont glaciales. L’ombre d’Heinz, l’amant de Klaus, qui a préféré se défenestrer plutôt qu’être déporté hante Klaus. Une rencontre avec René, un prisonnier français qui retourne au pays retrouver sa femme, va le mener en France où il va tenter de repartir à zéro. Mais même des dizaines d’années plus tard et une sorte de bonheur retrouvé avec Julien, les images de Buchenwald et d’Heinz ne cessent de le tourmenter.
Malgré l’intérêt évident du thème, j’ai bien eu du mal à lire ce roman, tant j’ai été gêné par les effets stylistiques, la surexploitation de toutes ces courtes phrases nominales qui hachent le discours (même si je comprends bien qu’elles sont censées refléter l’état d’urgence et de panique du personnage). Plaisir gâché.

« Il avait dix-neuf ans à son arrivée dans la boue et la poussière et les morts de Buchenwald. Sa jeunesse pantelante. Et sa jeunesse qui depuis son arrivée à Paris jouait au phénix. Mais que serait demain? On venait de l'agresser, de le frapper, de le haïr. Son numéro qui zigzaguait dans tout son corps, incandescent, mille-pattes, scorpions, 5395, son matricule, un kapo le lui rotait chaque matin à la face, ça te portera chance, putain de tante, paragraphe 175 et numéro 5395, et aujourd'hui sale Allemand dans Paris, et là-bas sale tante, une seule violence, mais la sexuelle plus folle encore, racisme sexuel, le mieux partagé au monde, femmes et pédés dans le même sac. »


Laura El Makki & Guillaume Gallienne - Un été avec Victor Hugo (Des Équateurs-Coll. Parallèles-27 avril 2016)
Un survol rapide de la vie d monument de la littérature française et de son œuvre. C’est agréable à lire, c’est le genre de lecture qui donne l’impression d’être un peu plus intelligent qu’on ne l’est. Et même si je n’y ai rien appris de nouveau (ou presque), ça ne fait jamais de mal de redonner un petit coup de fouet pour réanimer ses connaissances endormies.


Cédric Duroux - Les animaux sentimentaux (Buchet-Chastel Coll. Qui Vive-2016)
« Une version contemporaine de l’éternelle question des rapports entre sexe et amour. Un roman générationnel qui navigue entre le réel et la fiction, le français et l’anglais, et où l’on croise aussi bien David Bowie que le lapin d’Alice. » vantait la 4e de couverture.
Personnellement, je n’y ai trouvé qu’un roman prétentieux (l’usage abusif d’anglicismes, voire d’anglais purement et simplement, ajoute encore au ridicule des personnages), superficiel et donc sans aucun intérêt. N’est pas Armistead Maupin qui veut, et narrer les péripéties d’une bandes gays branchouilles, dont l’un est un websex addict bourré de TOC, et l’autre s’invente un ami imaginaire comme le font les gosses de 5 ans, ne suffit pas.
Et comme pour suppléer au vide du texte (ou ajouter au côté « roman-de-son-époque »), on a même le droit à une chanson et à une bande-annonce. Veinards va !
Que ce bouquin soit paru chez Buchet-Chastel restera pour moi un mystère (c’est tout juste si c’est du niveau H&O).


David Foenkinos - Le mystère Henri Pick (Gallimard-2016)
Grâce à Sister, première rencontre avec Foenkinos dont je m’étais jusque-là arrangé pour ne pas croiser le chemin. Et au final, une vraie bonne surprise.
L’histoire en elle-même n’a rien d’extraordinaire : dans une bibliothèque bretonne réservée aux manuscrits livres refusés par les éditeurs, une jeune éditrice tombe sur une pépite signée Henri Pick. À la recherche de l’auteur, elle découvre qu’il est un pizzaiolo mort deux ans auparavant et rien dans son existence ne vient étayer le fait qu’il soit réellement l’auteur du texte. Alors que le livre est un succès de librairie, un journaliste qui subodore le coup médiatique fait son enquête…
Foenkinos s’amuse à décrire le monde de l’édition avec malice, égratigne sans méchanceté tel ou tel. En plus, le suspens, rondement mené, tient jusqu’à la toute fin du roman. Je me suis régalé.

« On dit parfois qu'un coup de foudre est la reconnaissance d'un sentiment qui existe déjà en nous. » (p. 31)

« On croit que le Graal est la publication. Tant de personnes écrivent avec ce rêve d’y parvenir un jour, mais il y a pire violence que la douleur de n’être pas publié : l’être dans l’anonymat complet. Au bout de quelques jours, on ne trouve plus votre livre nulle part, et on se retrouve d’une manière un peu pathétique à errer. D’une librairie à l’autre, à la recherche d’une preuve que tout cela a existé. Publier un roman qui ne rencontre pas son public, c’est permettre à l’indifférence de se matérialiser. » (p. 34)

« Frédéric se sentait gêné d’encombrer le moment par ce roman assez médiocre finalement. Progressivement, il commençait à s’en détacher, à y déceler les failles et cette façon d’avoir voulu trop bien faire. Comme si chaque phrase était condamnée à être une preuve immédiate que l’on est formidable. Le premier roman est toujours celui d’un bon élève. Seuls les génies sont d’emblée des cancres. Mais il faut sûrement du temps pour comprendre les respirations d’un récit, ce qui se trame à l’abri de la démonstration. » (p. 39)

« Il est difficile de dater le début du déclin d'un amour. C'est progressif, insidieux, l'aisance sournoise des agonies. (…), quand les enfants seront grands, on pourra se retrouver, pensaient-ils. Ce fut exactement le contraire. Leur départ laissa un grand vide ; une sorte de falaise affective dans le salon. Une faille qu'aucun amour fatigué ne peut combler. Les garçons mettaient de la vie, apportaient des sujets de conversation, commentaient le monde. Maintenant tout cela n'existait plus. » (p. 127)

« Comment croire ceux qui disent écrire pour eux. Les mots ont toujours une destination, aspirent à un autre regard. Écrire pour soi serait comme faire sa valise pour ne pas partir. » (p. 141)

« [c’était] un homme très en retard sur la meilleure version de lui-même. » (p. 212)


Hanya Yanagihara - A Little Life (Doubleday-2015)
Après avoir « éclusé » la dernière fournée en date de livres papier, j’ai repris avec bonheur la lecture d’A little life, dont j’apprécie les réflexions sur l’amitié, le temps qui passe, les relations humaines et les « obligations » liées au statut d’adulte.
À ce jour, ma liseuse affiche 362 pages lues sur 672. Ce pavé devrait donc occuper encore une grande partie de mon mois d’octobre…

“You won’t understand what I mean now, but someday you will: the only trick of friendship, I think, is to find people who are better than you are—not smarter, not cooler, but kinder, and more generous, and more forgiving—and then to appreciate them for what they can teach you, and to try to listen to them when they tell you something about yourself, no matter how bad—or good—it might be, and to trust them, which is the hardest thing of all. But the best, as well.”

“Wasn’t friendship its own miracle, the finding of another person who made the entire lonely world seem somehow less lonely?”

“You know, maybe we should stop going to these parties; they’re becoming unhealthy exercises in masochism and self-loathing for us both.”
[…] But really, both of them knew why they kept attending these parties: because they had become one of the few opportunities the four of them had to be together, and at times they seemed to be their only opportunity to create memories the four of them could share, keeping their friendship alive by dropping bundles of kindling onto a barely smoldering black smudge of fire. It was their way of pretending everything was the same.
[…] He sensed that JB—who had so loved college, its structures and hierarchies and microsocieties that he had known how to navigate so well—was trying with every party to re-create the easy, thoughtless companionship they had once had, when their professional identities were still foggy to them and they were united by their aspirations instead of divided by their daily realities. So he organized these outings, and they all obediently followed as they had always done, giving him the small kindness of letting him be the leader, the one who decided for them, always.”

“Lately, he had been wondering if codependence was such a bad thing. He took pleasure in his friendships, and it didn’t hurt anyone, so who cared if it was codependent or not? And anyway, how was a friendship any more codependent than a relationship? Why was it admirable when you were twenty-seven but creepy when you were thirty-seven? Why wasn’t friendship as good as a relationship? Why wasn’t it even better? It was two people who remained together, day after day, bound not by sex or physical attraction or money or children or property, but only by the shared agreement to keep going, the mutual dedication to a union that could never be codified. Friendship was witnessing another’s slow drip of miseries, and long bouts of boredom, and occasional triumphs. It was feeling honored by the privilege of getting to be present for another person’s most dismal moments, and knowing that you could be dismal around him in return.”

“The thing he hadn’t realized about success was that success made people boring. Failure also made people boring, but in a different way: failing people were constantly striving for one thing—success. But successful people were also only striving to maintain their success. It was the difference between running and running in place, and although running was boring no matter what, at least the person running was moving, through different scenery and past different vistas. And yet here again, it seemed that Jude and Willem had something he didn’t, something that was protecting them from the suffocating ennui of being successful, from the tedium of waking up and realizing that you were a success and that every day you had to keep doing whatever it was that made you a success, because once you stopped, you were no longer a success, you were becoming a failure. He sometimes thought that the real thing that distinguished him and Malcolm from Jude and Willem was not race or wealth, but Jude’s and Willem’s depthless capacity for wonderment […] He envied this in them, this ability they had (though he realized that in Jude’s case at least, it was a reward for a long and punitive childhood) to still be awestruck, the faith they maintained that life, adulthood, would keep presenting them with astonishing experiences, that their marvelous years were not behind them. […] What must it feel like to be an adult and still discovering the world’s pleasures?
[…] At other times, he wondered whether it was the world that had lost its color, or his friends themselves. When had everyone become so alike? Too often, it seemed that the last time people were so interesting had been college; grad school. And then they had, slowly but inevitably, become like everyone else. […] His persistent nostalgia depressed him, aged him, and yet he couldn’t stop feeling that the most glorious years, the years when everything seemed drawn in fluorescents, were gone. Everyone had been so much more entertaining then. What had happened?
Age, he guessed. And with it: Jobs. Money. Children. The things to forestall death, the things to ensure one’s relevance, the things to comfort and provide context and content. The march forward, one dictated by biology and convention, that not even the most irreverent mind could withstand.
But those were his peers. What he really wanted to know was when his friends had become so conventional, and why he hadn’t noticed earlier.”

“Sometimes he wonders whether this very idea of loneliness is something he would feel at all had he not been awakened to the fact that he should be feeling lonely, that there is something strange and unacceptable about the life he has. Always, there are people asking him if he misses what it had never occurred to him to want, never occurred to him he might have […]. Some of them ask him with pity, and some ask him with suspicion: the first group feels sorry for him because they assume his singlehood is not his decision but a state imposed upon him; and the second group feels a kind of hostility for him, because they think that singlehood [is] his decision, a defiant violation of a fundamental law of adulthood.
Either way, being single at forty is different from being single at thirty, and with every year it becomes less understandable, less enviable, and more pathetic, more inappropriate.”

“Often, it feels as if he and Rhodes (and he and almost every one of his contemporaries at the firm) are living parallel versions of adulthood. Their world is governed by children, little despots whose needs—school and camp and activities and tutors—dictate every decision, and will for the next ten, fifteen, eighteen years. Having children has provided their adulthood with an instant and nonnegotiable sense of purpose and direction: they decide the length and location of that year’s vacation; they determine if there will be any leftover money, and if so, how it might be spent; they give shape to a day, a week, a year, a life. Children are a kind of cartography, and all one has to do is obey the map they present to you on the day they are born.
But he and his friends have no children, and in their absence, the world sprawls before them, almost stifling in its possibilities. Without them, one’s status as an adult is never secure; a childless adult creates adulthood for himself, and as exhilarating as it often is, it is also a state of perpetual insecurity, of perpetual doubt.”

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